Vers le milieu de l'après-midi, une foule joyeuse et bigarrée afflua vers la place principale de la capitale Micropolia. La campagne pour le référendum était lancée et le Parti Merksiste-Luniniste Francovar, par la voix de son Secrétaire National Georges Madrigan, allait donner sa consigne de vote. Partout dans l'assistance flottaient des drapeaux rouges, portant les symboles du PMLF, la lune et la pompe à vélo.
Alors que les militants du parti commençaient à s'impatienter, le Secrétaire National du PMLF arriva enfin et monta sur l'immense tribune, sous les ovations des militants.
Mes amis, camarades ! Il y a quelques mois de cela, nous avons chassé du pouvoir l'ignoble Jallan ! Les différents chefs de clan ont une fois de plus mis leurs querelles de côté et se sont réunis, afin de donner une constitution à la IIIème République. Je ne pouvais me soustraire à mon devoir et ayant à cœur de défendre les intérêts des travailleuses et des travailleurs, des paysans et des ouvriers, de la masse laborieuse de notre pays, je me suis joint à eux et j'ai tenté de faire entendre votre voix !
Cela ne s'est pas fait sans mal et bien souvent, j'ai dû taper du poing sur la table afin d'être entendu, afin que vous soyez entendus, car c'est bien à vous que je pensais tout au long de ces réunions et de ces discussions.
Hélas, bien souvent j'ai été le seul à avoir une opinion sur tel ou tel article de ce qui allait être notre Constitution. Je ne ferai pas état ici des différends qui m'ont opposé à maintes reprises aux autres chefs de clan et aux différents chefs de parti. Mais il est clair que j'étais bien le seul à défendre les intérêts du peuple, alors que eux, ces laquais, ne servaient que les intérêts de la finance, des actionnaires et des patrons !
Aujourd'hui, il vous est demandé de vous prononcer sur cette Constitution. Alors, bien sûr, mes adversaires politiques m'observent, pour voir si je ne vais pas commettre un faux-pas, ils s'attendent à ce que je m'oppose à eux frontalement en appelant à voter NON ! Ou, avec beaucoup de naïveté, ils espèrent que je vais me soumettre à leur vision étriquée, que je vais vous demander à vous, camarades, de mêler vos voix à celles de ceux qui voteront OUI, les nantis, les puissants, les quelques-uns qui tirent toutes les ficelles dans ce pays !
Non, mes amis, non ! Je ne vous demanderais pas de vous prononcer sur une Constitution lorsque l'opinion de celui qui vous représentait a été si peu écoutée, si peu respectée ! Ce combat n'est pas notre combat, c'est le leur ! Cette Constitution n'est pas notre Constitution, c'est la leur ! Camarades, dans la journée d'aujourd'hui et de demain, je vous demande de ne pas participer à ce simulacre de démocratie ! Abstenez-vous ! Que la voix de l'abstention soit la voix de ceux que l'on refuse d'entendre ! De cette façon, les puissants comprendront le message : nous ne nous soumettrons pas à votre vision de la société ! Abstention ! Abstention ! Abstention !
Ce cri fut bientôt repris par des milliers de gens. Abstention ! Abstention ! Abstention ! Puis, l'hymne du parti fut chanté par une foule qui savait que désormais, quelqu'un allait les représenter dignement et les défendre avec courage.